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Un examen approfondi de l'activité inventive dans le cas d'une invention mise en oeuvre par ordinateur

T0279/21 - Distribuées Aux Présidents Des Chambres De Recours

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Introduction

La Chambre technique de recours de l’Office européen des brevets (OEB) a rendu sa décision dans l'affaire T0279/21, concernant la demande de brevet EP 14734190.3 déposée par Swiss Reinsurance Company Ltd. Cette décision portait sur l'exigence d'activité inventive au sens de l’article 56 CBE, avec une attention particulière à l’interaction entre les éléments techniques et non techniques dans les inventions mises en œuvre par ordinateur. En abordant des questions telles que le traitement contrôlé par transitions d'état, les structures de données encapsulées et l'évaluation stochastique, la Chambre a réaffirmé l'importance de distinguer les contributions techniques des caractéristiques de modélisation abstraites ou commerciales.

Résumé de l'invention

L'invention concernait un système de traitement contrôlé par transitions d'état pour des objets de données dans des flux de travail. Ce système introduisait :

  • Des transitions dynamiques entre les états des processus ;
  • L'encapsulation des paramètres des tâches à l'aide de "balises opérationnelles" permettant d'imposer des contraintes à l'exécution des tâches ;
  • Un module d'évaluation stochastique pour guider les transitions des processus.

Contrairement aux moteurs de flux de travail traditionnels, qui reposent souvent sur une intervention humaine ou des étapes prédéfinies, cette invention visait à ajuster dynamiquement les flux de travail en fonction de facteurs internes et externes, offrant ainsi une plus grande flexibilité tout en réduisant la dépendance à l’intervention humaine.

Le déposant a mis en avant que la structure de données encapsulée et le module d'évaluation stochastique amélioraient le contrôle des processus tout en garantissant une sécurité accrue grâce à un accès contrôlé.

Points juridiques clés de la décision

Arguments de la division d'examen
La division d'examen a rejeté la demande pour absence d’activité inventive, avançant que :

  • L'invention représentait principalement des concepts abstraits de modélisation et de processus commerciaux, sans caractère technique ;
  • L'état de la technique (par exemple, D1, US 2010/0161558) divulguait déjà des systèmes de flux de travail comparables, y compris l'affectation dynamique de tâches basée sur les états des objets et les profils des utilisateurs ;
  • La mise en œuvre de telles règles de flux de travail était simple pour une personne du métier utilisant des techniques de programmation courantes.

Arguments de l’appelant (titulaire du brevet)
L'appelant a contesté en avançant que :

  • L'invention dépassait la simple modélisation de processus commerciaux en intégrant des moyens techniques tels que les "balises opérationnelles" et un module d'évaluation stochastique ;
  • Ces éléments introduisaient des solutions techniques pour le contrôle dynamique et le traitement en temps réel, répondant à des problèmes techniques dans la gestion de flux de travail décentralisés ;
  • Les caractéristiques revendiquées apportaient une amélioration par rapport à l'état de la technique, notamment en évitant les structures complexes de dossiers utilisées dans D1.

Analyse de la Chambre
L’analyse de la Chambre reposait sur l’approche COMVIK :

  • Le problème technique doit être formulé en distinguant les caractéristiques techniques des caractéristiques non techniques.
  • Les "balises opérationnelles" et le module d'évaluation stochastique, bien que nouveaux, ne contribuaient pas au caractère technique. Ils étaient considérés comme reflétant des règles commerciales ou des contraintes administratives, donc non techniques par nature.
  • La structure de données encapsulée, bien qu’étant un concept de programmation connu, n’apportait pas d’élément technique supplémentaire.

La Chambre a cité les décisions G 1/19 et T 0894/10 pour souligner que la simple automatisation de processus non techniques ou de concepts abstraits sur un ordinateur ne constitue pas une contribution technique, sauf si elle aboutit à un effet technique allant au-delà de la mise en œuvre standard.

Leçons à retenir

Distinction entre les éléments techniques et non techniques

  • Pour les inventions mises en œuvre par ordinateur, l'OEB évalue strictement si les caractéristiques revendiquées résolvent un problème technique ou se contentent d’automatiser un processus non technique. Des éléments tels que les "balises opérationnelles" doivent démontrer leur capacité à produire des effets techniques allant au-delà de la gestion routinière des données.

Importance de la contribution technique

  • L'invention revendiquée doit fournir une contribution technique qui dépasse les solutions connues. Par exemple, l'encapsulation, bien qu’utile, est insuffisante si elle se limite à la mise en œuvre d’un concept connu sans avantages techniques supplémentaires.

Éviter de s'appuyer sur des contraintes commerciales

  • Les caractéristiques découlant d'exigences commerciales (par exemple, les états des tâches, les règles de flux de travail) sont peu susceptibles de contribuer à l'activité inventive, sauf si elles aboutissent à une avancée technique.

Rédaction précise des revendications

  • Les déposants doivent clairement définir la nature technique des caractéristiques revendiquées et s’assurer qu’elles sont suffisamment détaillées dans la description pour éviter leur interprétation comme des abstractions non techniques.

Fondement juridique et jurisprudence citée

  • Article 56 CBE : Évaluation de l'activité inventive.
  • Approche COMVIK : Distinction entre les caractéristiques techniques et non techniques dans les inventions de type mixte.
  • Jurisprudence :
    • G 1/19 : Directives sur le caractère technique dans les simulations mises en œuvre par ordinateur.
    • T 0894/10 : Analyse des représentations des flux de travail et de leur contribution technique.

Conclusion

La décision T0279/21 met en lumière les défis liés à l'obtention de brevets pour les inventions mises en œuvre par ordinateur, en particulier celles impliquant des flux de travail ou des processus commerciaux. Elle renforce la nécessité pour les déposants de démontrer un effet technique clair découlant de leurs revendications, au-delà de la simple automatisation de concepts abstraits. Cette décision constitue un rappel essentiel pour les praticiens du brevet de procéder à une évaluation rigoureuse du caractère technique de leurs inventions selon les normes de la CBE.

Lien vers le dossier : ICI 

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Avertissement juridique

Les informations fournies dans cet article de blog sont à des fins d'information générale uniquement et ne constituent pas un avis juridique. Le résumé et l'analyse de l'affaire de l'OEB sont basés sur des informations disponibles publiquement et visent à offrir des perspectives sur la décision et ses implications. Ce contenu ne doit pas être utilisé comme substitut à un avis juridique professionnel adapté à votre situation spécifique. Pour des conseils relatifs à des questions juridiques spécifiques sur le droit des brevers, vous devez consulter un conseil en propriété industrielle ou un avocat qualifié.